Ahhh les émotions ! 

Quel vaste sujet n’est-ce pas ? 

Qu’elles soient les nôtres ou celles de nos enfants, elles semblent si complexes à accueillir, à comprendre et à définir. Les émotions sont tellement intimes, puisqu’elles s’expriment en fonction d’événements, de situations qui nous sont personnelles, mais en même temps universelles, parce qu’au delà de la culture, de la langue, de la société, tout le monde ressent des émotions, c’est ce qui fait de nous des êtres vivants.

Lorsque notre enfant atteint l’âge de deux ans, parfois même avant, on commence à nous parler du fameux terrible two, cette étape redoutée par tous les parents, comme un sparadrap qu’on doit enlever en sachant que ça fait mal, ou comme un rendez-vous chez le dentiste ou le gynécologue (ou les deux^^) qui arrive et qu’on ne peut pas louper. Et quand on entend les personnes en parler une fois que l’enfant « y est passé », on a l’impression qu’on a affaire à des vétérans de la guerre « j’y étais », « je l’ai vécu de l’intérieur moi! », « on n’en ressort jamais indemnes » … 

Bref, vous l’aurez compris, j’exagère à peine la chose, mais toujours est-il que lorsque c’est à notre tour de devoir faire face aux émotions de nos enfants, on se retrouve bien souvent démunis. 

Aujourd’hui j’ai choisi de vous parler de la peur. 

Alors pourquoi la peur ? Déjà parce qu’en règle générale lorsqu’on se lance sur le sujet des émotions, c’est souvent la colère qui fait l’unanimité ! Bien entendu, ces fameuses colères sont assez complexes à accueillir et à gérer, tant du côté du parent que du côté de l’enfant. Mais pour autant il n’est pas d’émotion plus importante que les autres et selon moi, il est tout aussi intéressant de se pencher sur la peur. 

Chez nous, comme dans toutes les familles je crois, les peurs ont évolué avec l’âge des enfants. Même en ce qui me concerne, ce qui me faisait peur il y a quelques années me paraît aujourd’hui bien futile. C’est logique ! En grandissant, en gagnant en maturité, l’importance accordée à telle ou telle chose change. 

A l’heure où je vous écris, les peurs de Zélie se concentrent surtout sur les bruits : elle a peur de l’orage, des feux d’artifice (quoi que ça s’est apaisé) et de la pluie sur son velux. Du côté de Malo, ce sont également des bruits qui lui font peur, mais pas les mêmes que sa soeur : ce sont les bruits des « machines » qui lui font peur : la moissonneuse batteuse quand elle passe à côté de lui, la machine à traire de mon papa, certaines motos ou voitures. Pourtant il adore les véhicules… 

Et moi ? Eh bien j’ai peur du vide, de la mort, des araignées, du feu. A 31 ans, je suis capable de savoir pourquoi j’ai peur de tout ça, tout a un rapport avec mon histoire, des événements qui se sont déroulés à certains moments de ma vie, mais pour autant, je suis incapable de passer outre et quand j’y suis confrontée, il me faut alors beaucoup de sang froid, de maîtrise de moi-même pour ne pas paniquer. 

Vous voulez une anecdote rigolote ? Pour celles et ceux qui ne le savent pas, mes parents sont agriculteurs donc j’ai vécu dans une ferme, le genre d’endroit que les araignées adorent ! Lorsque j’en découvrais une dans ma chambre (ou la salle de bain que je partageais avec ma soeur), d’abord je hurlais de toutes mes forces, puis j’appelais en panique mon petit frère (11 ans plus jeune que moi, donc à 16 ans il en avait 5 ^^) pour qu’il la vire là maintenant tout de suite ! Aujourd’hui j’en rigole, mais parfois, quand il y a de gros spécimens dans la maison, je regrette presque que mon frère n’habite pas là 😀 

Tout ça pour dire que si pour moi les peurs sont difficiles à maîtriser, il est facile de comprendre que c’est quasiment impossible pour les enfants de le faire. 

J’avais donc envie de partager avec vous, 4 ouvrages de littérature de jeunesse qui traitent de la peur afin d’aider les enfants à mettre des mots sur leurs ressentis. Bien entendu il en existe plein d’autres, mais ceux-ci je les aime particulièrement. 

Volontairement, je n’ai pas inclus les livres qui traitent de plusieurs émotions à la fois (La couleur des émotions, L’imagerie des émotions, et j’en passe …), j’ai préféré plutôt m’attarder sur ceux dont la peur est la seule émotion présente. 

On y va ? 

1. Petite Peur. 

Je commence avec ce petit livre cartonné, de forme carrée, parfait pour aborder la notion de peur avec les tout-petits. 

Petite Boule a peur du noir, elle sent un noeud dans son ventre et elle se transforme en Petite Peur. On sent sa détresse jusqu’à ce que sa maman arrive et l’aide à s’apaiser. Alors elle redevient Petite Boule. 

Ce que j’aime particulièrement dans cet ouvrage, c’est le fait de voir que lorsque la peur arrive, elle prend possession de nous entièrement. Cela se traduit par cette « transformation » en Petite Peur. Le vocabulaire utilisé est aussi très intéressant parce qu’avec des mots très simples, l’autrice Nadine Brun-Cosme explique parfaitement le processus de peur, ce que l’on peut ressentir, sans jugement aucun : le ventre se serre, les frissons, l’envie de pleurer, de fuir, les dents qui claquent, l’envie de crier et ENFIN, la délivrance au contact de la personne qui va nous apaiser (ici le parent). 

Les illustrations sont très simples, mais pour autant, elles sont le miroir de ce que ressent Petite Peur : il fait sombre, elle est seule, on comprend l’émotion qui la traverse avec la disposition de ses sourcils et de sa bouche, et puis surtout, ces petits « haricots » bleu foncé que Petite Peur veut fuir mais qui semble grandir et la poursuivre : c’est l’illustration de la peur. 

Et puis quand Petite Peur retrouve sa maman, la peur (aka les petits haricots bleu foncé) se résorbe, et le noir disparait au profit d’un bleu clair beaucoup plus serein. 

J’aime beaucoup que cet ouvrage, et tous les autres de la collection, aient été écrits en collaboration avec une psychologue qui est spécialisée dans les très jeunes enfants. 

Il n’est jamais trop tôt pour accueillir les émotions des enfants avec une grande bienveillance et cet album est vraiment parfait à mon sens, afin de parler de la peur avec les plus jeunes. Ici, Zélie et Malo l’aiment beaucoup et on le lit très souvent. 

Petite Peur - Nadine Brun-Cosme et Marion Cocklico
Editions Fleurus - Dès 9 mois 
Prix : 8,90€ 

Livre offert par les éditions Fleurus ♥

2. Les émotions de Gaston – J’ai peur 

J’ai découvert cette collection à sa création et je suis absolument conquise par tous les albums que nous possédons (nous en avons 3 pour le moment). Si au début j’ai eu du mal avec la licorne (parce qu’en règle générale, je ne me dirige pas spontanément vers les ouvrages anthropomorphiques, c’est à dire où le héros est un animal qui présente toutes les caractéristiques des humains, mais là en plus cet animal est une licorne, donc un animal qui n’existe pas …) je me suis vite ravisée, non seulement parce que Zélie et Malo ont tout de suite accroché et s’y sont immédiatement identifiés, mais ensuite parce que le choix de la licorne prend tout son sens dans l’histoire. 

Gaston est une licorne qui a quelque chose de magique : sa crinière change de couleur selon ses émotions. Et encore une fois, c’est très astucieux, parce que comme dans Petite Peur qui se transforme physiquement, là avec Gaston, l’émotion se voit, et se voit très bien puisque c’est sa crinière qui change de couleur. On se rend alors compte que lorsqu’une émotion nous submerge, on en est tout entier imprégné. 

Cependant, dans ce livre comme dans le précédent, les auteurs ne sont pas tombés dans le piège de dire : « l’émotion est ce qui te définit », bien au contraire. L’émotion nous submerge ponctuellement, mais rien n’est irréversible puisque Petite Peur retrouve sa physionomie normale quand la peur est passée et Gaston retrouve sa crinière arc-en-ciel lorsque tout va bien. Ainsi, on ne dit pas « cet enfant est colérique » ou bien « elle est trouillarde celle-ci », mais plutôt : la colère ou la peur s’est emparée de lui/elle à tel moment, parce que … 

Je reviens à mon Gaston ! 

Gaston en ce moment, il a peur. En fait, il a peur quand arrive la nuit parce que le noir s’insinue partout. Encore une fois, la peur est expliquée par des mots simples, comme les frissons par exemple. 

Mais ce qui fait la spécificité de cet album (et de la collection en général) c’est la partie « sophrologie », car l’autrice, Aurélie Chien Chow Chine est sophrologue, spécialisée chez les enfants de maternelle. Elle apporte des clés afin de dompter la peur à travers des exercices de relaxation très simples à mettre en oeuvre et facilement compréhensibles par les enfants. Selon elle, la respiration joue un rôle prépondérant dans la gestion des émotions, quelle qu’elles soient. Mais allez dire à un enfant « allez respire doucement, ta peur va partir », pas sûre qu’il comprenne où vous voulez en venir. Les petits mouvements proposées par l’autrice ont l’avantage d’être très ludiques. Pour dompter sa peur, Gaston ferme les yeux et inspire par le nez. Il bloque sa respiration et avec ses mains, dessine une armure de courage tout autour de lui. Quand l’armure est terminée, il souffle très fort par la bouche. Il fait cet exercice de respiration 3 fois pour être bien protégé par son armure de courage ! 

Bref j’adore !!! 

Les émotions de Gaston : j'ai peur - Aurélie Chien Chow Chine
Editions Hachette Enfant
Prix : 6 euros
3. Scritch-scratch Dip Clapote ! 

Je vous ai parlé succinctement de cet album récemment, lorsque je vous ai présenté notre table d’Halloween. Aujourd’hui j’avais envie de revenir dessus parce qu’il a fait énormément de bien à Zélie à un moment où la pluie ne cessait de tomber sur son velux (eh oui, on habite dans le Nord ^^ #cliché) Ce livre raconte l’histoire d’une petite grenouille qui a peur des bruits qu’elle entend la nuit. Le scritch-scratch, le dip et le clapote, ne sont vraiment pas rassurants pour le petit Jérôme. Mais son papa a une super idée, il emmène son fils découvrir ce qui fait scritch-scratch, dip et clapote. Les voilà dehors à contempler la lune et le manège affairé des animaux qui, eux, ne dorment pas la nuit. Scritch-scratch c’est la taupe qui creuse une galerie, Diiiiiiiip c’est le cri d’un oiseau de nuit et clapote c’est le bruit que fait le poisson en sautant dans l’eau.

Finalement, la nuit n’est pas si terrible et ces bruits qui semblaient effrayants lorsqu’ils étaient inconnus sont tellement apaisants. 

J’aime beaucoup l’initiative du papa grenouille qui a emmené son fils écouter les bruits de la nuit pour qu’ils soient moins impressionnants, c’est souvent l’inconnu qui fait peur.

Scritch Scratch Dip Clapote - Kitty Crowther
Editions L'école des Loisirs - Pastel
Prix : 11,20€
4. Le trouillosaure.

Pour le dernier album de cette sélection, j’ai choisi une histoire trop rigolote, celle d’un dinosaure tellement peureux que jamais personne n’a pu le voir, même ses parents, puisqu’il se cachait au moindre bruit, le crac de son oeuf lorsqu’il a éclos, le scrountch du dinosaure qui mange, le paf de celui qui se bagarre, le burp de celui qui digérait, le ron pch de celui qui ronflait, le prout de celui qui … Bref vous voyez le truc quoi ! (et l’épisode pipi caca est celui qui fonctionne le mieux avec mes loulous ahah)Tous les petits bruits du quotidien effrayaient tellement le trouillosaure qu’il se planquait à la moindre occasion. Et le jour où il y eut un énorme boum, il s’est caché aussi. Ce boum a engendré la fin des dinosaures… enfin, peut-être pas tous ^^ 

J’aime bien cette histoire, puisque souvent les gens ont tendance à associer la peur avec de la faiblesse « ouh la chochotte », « arrête de faire ta fillette », et j’en passe … Ici, au final, la peur du trouillosaure en a fait sa force puisque le fait de s’être caché après le gros boum l’a préservé de l’extinction des autres dinosaures. Bien entendu, rien de cela n’est vrai, mais cette histoire, en plus d’être vraiment trop drôle tant au niveau du texte que des illustrations, aura eu le mérite de permettre aux enfants qui ont peur de ne pas perdre leur confiance en eux. 

Le trouillosaure - Sandra Solinet et Peter Elliott
Editions Amaterra
Prix : 9,50€

Voilà, j’ai donc terminé ma petite sélection et j’en profite également pour vous remettre les liens vers d’autres articles dans lesquels j’ai présentés des livres qui traitent de la peur. C’est le cas de la couleur des émotions, l’imagerie des tout-petits : les émotions 

Ceci est ma cent-dixième participation au rendez-vous Chut, les enfants lisent !

2 réponses pour “Une sélection de livres sur la peur {Chut, les enfants lisent #110}”

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