Je m’appelle Adi. J’aime ma vie d’écolière. Mais j’aime aussi danser sous la pluie, fabriquer des poupées d’herbe pour mes petites soeurs, nager dans les eaux du fleuve et essayer de courir plus vite que le vent. Un jour, j’ai arrêté de danser, car mon oncle Amadou a décidé qu’il faudrait me marier… »
Voilà le résumé de cette merveille de littérature de jeunesse qu’est Adi de Boutanga, un ouvrage superbe qui aborde la vie en Afrique avec des mots d’une grande justesse et d’une grande sensibilité.
Car tout est beau dans ce livre : la force des mots, la poésie des rêves de la petite Adi, petite camerounaise de 13 ans et les jolies illustrations très colorées à la manière de l’art africain.
A la première ouverture du livre, je l’ai trouvé extrêmement dense et fourni : le texte est très long et les illustration prennent toute la place dans ce livre grand format. En fait, on en prend plein les yeux à chaque fois qu’on tourne la page. La couleur orange prédomine et brûle les yeux, comme la terre du Cameroun au soleil.
C’est un ouvrage qui demande plusieurs lectures pour s’en imprégner vraiment. Soit on se concentre sur le texte, soit on s’émerveille devant les illustrations, mais difficile de faire les deux.
Alors je vous propose de commencer par le texte.
La narratrice, c’est Adi, une petite camerounaise de treize ans. Elle nous raconte ses rêves, ses passions .. bref, son quotidien de petite camerounaise de treize ans. Jusqu’au jour où son oncle décide qu’il est temps qu’elle se marie. Alors pour protéger leur petite fille, ses parents l’envoient chez une de ses tantes, avec d’autres fillettes, qui, elles aussi étaient là parce qu’on avait décidé pour elles, qui serait leur mari. En sécurité et à l’abri, Adi continue de grandir. Elle est reconnaissante envers sa tante et ses parents de lui avoir épargné ce mariage forcé et de lui avoir permis de continuer d’aller à l’école. Et puis un jour elle a 22 ans. Elle est amoureuse d’un jeune garçon qui a le même âge. Idrissa, c’est son nom, demande alors la main d’Adi auprès de sa tante. Mais c’est à Adi seule de décider.
J’ai trouvé l’histoire très juste, parce qu’elle reflète le quotidien et le sort réservé à tellement de petites filles dans le monde. Le sujet du mariage forcé me touche énormément. Je me sens démunie devant ce fléau et quelle joie alors d’avoir entre les mains ce petit bijou pour ouvrir les yeux des enfants sur ce qui se passe ailleurs. Certes, c’est un sujet empreint d’une grande tristesse, cependant, ici, l’album se veut joyeux, rêveur et optimiste, comme un appel à ce qu’il y ait bien plus de Mama Ly et de parents éclairés dans le monde pour sauver l’avenir de millions de petites filles.
A la toute fin de l’album, une double page propose d’en savoir davantage à propos du Cameroun, des différents peuples, du système scolaire et du rôle de Mama Ly qui existe vraiment.
Et si on s’intéressait aux illustrations ?
Marc Daniau a fait de « Adi de Boutanga » une véritable oeuvre d’art, un recueil de tableaux tous plus beaux les uns que les autres. On y retrouve, au fil des pages, des éléments significatifs de l’art africain : des couleurs vives et chatoyantes, des rosaces, et des éléments qui rappellent les dessins sur les boubous, ces vêtements hauts en couleurs que portent les africains. Marc Daniau a réussi à représenter les émotions des personnages, comme cette étreinte déchirante entre Adi et son papa en arrière plan alors que l’oncle, le visage fermé, s’éloigne sans même un regard pour eux, ou encore le visage espiègle et rayonnant d’Adi, attablée à son bureau d’écolière.
Voilà donc un album d’une grande qualité, idéal pour évoquer avec les enfants le Cameroun et la condition féminine dans ce pays, mais également partout dans le monde.
Livre offert par les éditions Albin Michel Jeunesse, merci pour votre confiance ♥